Parisienne pendant les six premières années de ma vie, ma petite enfance n'était pas familière des animaux. Bien sûr, je fais exception de Dicko, le chien de mon grand-père et des quelques poules et lapins qu'il élevait dans son pavillon de banlieue parisienne… car le Milou lui, c'était un homme de la campagne, né au plus profond du Périgord. J'avais peut-être aussi eu l'occasion de voir quelques grosses bêtes au zoo de Vincennes et à la foire du Trône, mais de vache, point !
C'est ainsi qu'en arrivant à Buzy, petit patelin en Meuse de quelques cinq cents âmes, je fis connaissance avec les vaches.
Au village où nous fumes parachutés au beau milieu des années 50, beaucoup de foyers étaient agriculteurs. Les fermiers possédaient de petits troupeaux de dix à vingt vaches laitières et quelques hectares de prés et cultures où ils devaient produire, sur la glaise collante de Woëvre, de quoi nourrir les bêtes et faire vivre chichement leurs familles. Les caprices de la météo étaient alors dramatiques. "Tes sous, Papa, ils sont dans l'eau !" disait une fillette observant, l'année de ma naissance, les pluies de juillet rendant impossible les moissons.
Les bêtes, c'étaient des Frisonnes. Enfin, à cette époque, on disait cela comme cela parce que de nos jours, on préfère les appeler Holstein ou Prim'Holstein, ou encore FFPN (française frisonne pie noir). Ce sont pratiquement les mêmes bêtes mais ça fait plus chic. Originaires de Hollande, et plus précisément de Frise comme leur nom ne l'indique plus. Le hasard faisait qu'à Buzy, plusieurs fermiers non parents entre eux, portaient le nom de Frizon, mais cette homonymie était pure coïncidence. Pour ma part, je ne connaissais de ce nom que notre lointain cousin Roger Frison-Roche originaire de Beaufort où il n'y a pas de vaches frisonnes mais de belles Tarines brunes. Ces vaches, qu'on les appelle Frisonnes, Holstein ou Prim'Holstein, elles ont toutes les caractéristiques correspondant à leur qualité de bonnes laitières : fesses maigres et osseuses inaptes à donner de bons beefsteaks, grosse bedaine pour digérer beaucoup d'herbe, pis rose dodu et veiné. A cette époque, elles avaient encore toutes leurs cornes dont on n'avait pas encore eu l'idée de les amputer. J'allais oublier de dire que leur robe est noire et blanche (on dit "pie noire") et que la variabilité de ces taches permettait de distinguer la Marguerite de la Gertrude ou de l'Hortense, car, on l'aura compris, chacune était affublée d'un prénom vieillot ; il est évident qu'on n'aurait pas eu l'idée de leur donner le nom de la fermière et encore moins celui de sa fille.
La traite se faisait encore à la main. J'étais admirative de voir une amie âgée d'à peine 2 ou 3 ans de plus que moi qui n'en avais que six, extraire des ses vaches un liquide blanc et mousseux à l'odeur que je trouvais écœurante. Assise sur une sorte de tabouret inconfortable à une seule patte attaché à sa taille par une sangle de cuir, elle triturait alternativement deux par deux les pis roses de ses bêtes, faisant sortir le lait qui atterrissait par giclées sonores dans un seau en fer blanc placé entre ses genoux. Nous défiant d'y parvenir. Certaines bêtes étaient dociles, d'autres moins. Quant au lait "frais", c'est-à-dire tiède, je n'ai jamais aimé son odeur et son goût doucereux. Cependant, je n'ai jamais retrouvé l'arome et la délicieuse onctuosité de ce même lait bien refroidi et cru que nous allions chercher ma sœur et moi dans la ferme la plus proche. Nous guettions depuis nos fenêtres la sortie des vaches dans la cour de la ferme, certaines qu'alors la traite était terminée. Parfois, nous devions attendre que le lait soit filtré dans les grands bidons d'aluminium avant que la Paulette emplisse notre pot émaillé du litre quotidien qui était nécessaires et notre consommation. Pendant ce temps, déjà incorrigible pipelette, je lui faisais la causette sans jamais me départir de mon éternel et légendaire sourire. Si nous tardions à venir à la ferme, il fallait renoncer au lait car le laitier passait assez tôt pour la collecte. Le camion n'était pas comme maintenant équipé d'une rutilante citerne en inox réfrigérée. On y échangeait simplement deux fois par jour les bidons pleins de la traite contre des bidons vides, les cabossant dans le feu de l'action. Il ne fallait pas perdre de temps, surtout quand le ciel était à l'orage.
Sitôt arrivées à la maison, Maman mettait, à mon grand dam, le lait à bouillir dans la casserole en aluminium réservé à cet usage. Il ne fallait pas le quitter des yeux car il débordait très vite après que l'anti-monte lait ait commencé à grelotter dans le fond du récipient. Le lait prenait alors un vilain goût de cuit, et le nettoyage de la casserole et de la cuisinière devenait une véritable corvée.
Les trayeuses électriques ont fait rapidement leur apparition dans les écuries. La traite avait lieu deux fois par jour, au petit matin et en fin d'après-midi. En hiver, les vaches étaient sur place, dans l'étable que nous appelions "l'écurie". Elle hébergeait aussi un ou deux cochons ; le cheval de labour ; le chien. Cette écurie au puissant parfum âcre communiquait avec la cuisine par une simple porte. Conformément au système de l'habitat lorrain, elle constituait une travée complète, entre la façade et le jardin, le long de l'habitation composée d'une cuisine et d'une chambre, avec parfois une salle à manger entre les deux. La chaleur animale produite dans l'écurie fournissait un chauffage rustique mais économique, seule la cuisine étant chauffée par une cuisinière à bois installée dans l'ancienne cheminée et décrire laquelle il y avait parfois des poussins en couvaison artificielle. L'écurie servait aussi de lieux d'aisances en hiver quand le froid dissuadait d'aller dans cabane au fond du jardin. Il fallait bien regarder où on mettait les pieds, de chaque côté de la rigole de récupération du purin, avant de baisser culotte et nos petits derrières roses si possible pas trop près d'une vache… et nous boucher le nez ! Une bête meuglait, une autre lui répondait en écho, bruit de chaine, de sabot dans la paille, de foin avalé par un museau avide, flop d'une bouse, cascade d'urine chaude. Il faisait sombre. Pas question de s'attarder à la lecture de quelque Sylvain et Sylvette !
À la belle saison, c'est-à-dire quand l'herbe avait commencé à verdir et qu'on ne craignait plus la neige, les vaches étaient aux prés. De ce fait, les troupeaux devaient traverser quatre fois par jour le village, laissant au passage quelques bouses qui éclaboussaient les rues, pour se rendre à la traite dans leurs écuries qui s'équipaient rapidement de trayeuses électrique. Va et vient biquotidien qui faisait le grand désespoir de Papa, car si elles s'étaient attardées un peu trop près de l'escalier de son bureau de poste, les clients indélicats ne manquaient pas de ramener sous leurs bottes ou leurs godillots quelques parcelles de l'excrément verdâtre qui laissait sur le plancher de la salle d'attente des taches tenaces et, dans tout le bureau, une odeur bien paysanne !
C'est ainsi qu'en arrivant à Buzy, petit patelin en Meuse de quelques cinq cents âmes, je fis connaissance avec les vaches.
Au village où nous fumes parachutés au beau milieu des années 50, beaucoup de foyers étaient agriculteurs. Les fermiers possédaient de petits troupeaux de dix à vingt vaches laitières et quelques hectares de prés et cultures où ils devaient produire, sur la glaise collante de Woëvre, de quoi nourrir les bêtes et faire vivre chichement leurs familles. Les caprices de la météo étaient alors dramatiques. "Tes sous, Papa, ils sont dans l'eau !" disait une fillette observant, l'année de ma naissance, les pluies de juillet rendant impossible les moissons.
Les bêtes, c'étaient des Frisonnes. Enfin, à cette époque, on disait cela comme cela parce que de nos jours, on préfère les appeler Holstein ou Prim'Holstein, ou encore FFPN (française frisonne pie noir). Ce sont pratiquement les mêmes bêtes mais ça fait plus chic. Originaires de Hollande, et plus précisément de Frise comme leur nom ne l'indique plus. Le hasard faisait qu'à Buzy, plusieurs fermiers non parents entre eux, portaient le nom de Frizon, mais cette homonymie était pure coïncidence. Pour ma part, je ne connaissais de ce nom que notre lointain cousin Roger Frison-Roche originaire de Beaufort où il n'y a pas de vaches frisonnes mais de belles Tarines brunes. Ces vaches, qu'on les appelle Frisonnes, Holstein ou Prim'Holstein, elles ont toutes les caractéristiques correspondant à leur qualité de bonnes laitières : fesses maigres et osseuses inaptes à donner de bons beefsteaks, grosse bedaine pour digérer beaucoup d'herbe, pis rose dodu et veiné. A cette époque, elles avaient encore toutes leurs cornes dont on n'avait pas encore eu l'idée de les amputer. J'allais oublier de dire que leur robe est noire et blanche (on dit "pie noire") et que la variabilité de ces taches permettait de distinguer la Marguerite de la Gertrude ou de l'Hortense, car, on l'aura compris, chacune était affublée d'un prénom vieillot ; il est évident qu'on n'aurait pas eu l'idée de leur donner le nom de la fermière et encore moins celui de sa fille.
La traite se faisait encore à la main. J'étais admirative de voir une amie âgée d'à peine 2 ou 3 ans de plus que moi qui n'en avais que six, extraire des ses vaches un liquide blanc et mousseux à l'odeur que je trouvais écœurante. Assise sur une sorte de tabouret inconfortable à une seule patte attaché à sa taille par une sangle de cuir, elle triturait alternativement deux par deux les pis roses de ses bêtes, faisant sortir le lait qui atterrissait par giclées sonores dans un seau en fer blanc placé entre ses genoux. Nous défiant d'y parvenir. Certaines bêtes étaient dociles, d'autres moins. Quant au lait "frais", c'est-à-dire tiède, je n'ai jamais aimé son odeur et son goût doucereux. Cependant, je n'ai jamais retrouvé l'arome et la délicieuse onctuosité de ce même lait bien refroidi et cru que nous allions chercher ma sœur et moi dans la ferme la plus proche. Nous guettions depuis nos fenêtres la sortie des vaches dans la cour de la ferme, certaines qu'alors la traite était terminée. Parfois, nous devions attendre que le lait soit filtré dans les grands bidons d'aluminium avant que la Paulette emplisse notre pot émaillé du litre quotidien qui était nécessaires et notre consommation. Pendant ce temps, déjà incorrigible pipelette, je lui faisais la causette sans jamais me départir de mon éternel et légendaire sourire. Si nous tardions à venir à la ferme, il fallait renoncer au lait car le laitier passait assez tôt pour la collecte. Le camion n'était pas comme maintenant équipé d'une rutilante citerne en inox réfrigérée. On y échangeait simplement deux fois par jour les bidons pleins de la traite contre des bidons vides, les cabossant dans le feu de l'action. Il ne fallait pas perdre de temps, surtout quand le ciel était à l'orage.
Sitôt arrivées à la maison, Maman mettait, à mon grand dam, le lait à bouillir dans la casserole en aluminium réservé à cet usage. Il ne fallait pas le quitter des yeux car il débordait très vite après que l'anti-monte lait ait commencé à grelotter dans le fond du récipient. Le lait prenait alors un vilain goût de cuit, et le nettoyage de la casserole et de la cuisinière devenait une véritable corvée.
Les trayeuses électriques ont fait rapidement leur apparition dans les écuries. La traite avait lieu deux fois par jour, au petit matin et en fin d'après-midi. En hiver, les vaches étaient sur place, dans l'étable que nous appelions "l'écurie". Elle hébergeait aussi un ou deux cochons ; le cheval de labour ; le chien. Cette écurie au puissant parfum âcre communiquait avec la cuisine par une simple porte. Conformément au système de l'habitat lorrain, elle constituait une travée complète, entre la façade et le jardin, le long de l'habitation composée d'une cuisine et d'une chambre, avec parfois une salle à manger entre les deux. La chaleur animale produite dans l'écurie fournissait un chauffage rustique mais économique, seule la cuisine étant chauffée par une cuisinière à bois installée dans l'ancienne cheminée et décrire laquelle il y avait parfois des poussins en couvaison artificielle. L'écurie servait aussi de lieux d'aisances en hiver quand le froid dissuadait d'aller dans cabane au fond du jardin. Il fallait bien regarder où on mettait les pieds, de chaque côté de la rigole de récupération du purin, avant de baisser culotte et nos petits derrières roses si possible pas trop près d'une vache… et nous boucher le nez ! Une bête meuglait, une autre lui répondait en écho, bruit de chaine, de sabot dans la paille, de foin avalé par un museau avide, flop d'une bouse, cascade d'urine chaude. Il faisait sombre. Pas question de s'attarder à la lecture de quelque Sylvain et Sylvette !
À la belle saison, c'est-à-dire quand l'herbe avait commencé à verdir et qu'on ne craignait plus la neige, les vaches étaient aux prés. De ce fait, les troupeaux devaient traverser quatre fois par jour le village, laissant au passage quelques bouses qui éclaboussaient les rues, pour se rendre à la traite dans leurs écuries qui s'équipaient rapidement de trayeuses électrique. Va et vient biquotidien qui faisait le grand désespoir de Papa, car si elles s'étaient attardées un peu trop près de l'escalier de son bureau de poste, les clients indélicats ne manquaient pas de ramener sous leurs bottes ou leurs godillots quelques parcelles de l'excrément verdâtre qui laissait sur le plancher de la salle d'attente des taches tenaces et, dans tout le bureau, une odeur bien paysanne !
Notre maison, à droite, était une ancienne école. On entrevoit au loin la ferme du Camille. La maison à gauche était devenue une boucherie.
Pour nous, les enfants, "aller aux vaches" avec la Claudine dans l'après-midi était une grande joie ! En effet, parfois, pendant les vacances, afin d'alléger le travail de ses parents, notre amie était parfois chargée d'aller chercher les bêtes au parc. C'était alors toute une bande de gosses qui l'accompagnait. Parfois, le chien, un teigneux qui s'accrochait à la queue des vaches pour les faire obéir, était de l'expédition. Cela facilitait la tâche quand les bêtes étaient parquées sur "la côte", de l'autre côté de l'Orne, parce qu'elles avaient alors la fâcheuse idée d'aller prendre le frais dans la rivière, au niveau du pont. Il nous était alors très difficile de les faire sortir de l'eau et des rives boueuses où leurs grosses pattes creusaient des trous profonds car nous ne pouvions nous y aventurer au risque d'y laisser nos bottes. Sinon, il fallait être patient et crier "allez, allez !" pour les convaincre de prendre le bon chemin et de passer sur le pont pour rejoindre la ferme.
Le fameux pont sur l'Orne. Comme sur cette carte, il y avait souvent des roulottes de "camps-volants - on disait "caramougnats"- qui s'installaient au bord de la rivière. Les célèbres "Fourneaux" étaient du lot. On craignait alors pour les poules du village.
Il m'est arrivé, assez rarement, de passer quelques après midi "au pâquis de la Bulle" avec ma copine Nadette, d'une autre ferme, pour y garder les vaches. La ferme de son père n'était pas très prospère et son petit cheptel était souvent conduit au pâquis communal. L'endroit n'était pas clos. Il fallait avoir l'œil sur quatre ou cinq vaches paisibles qui broutaient les joncs de cette mauvaise prairie humide et marécageuse. Même si les bêtes demandaient peu d'attention, nous ne nous ennuyions pas... la prairie était un riche sujet d'inspiration pour nos jeux enfantins.
Et les chevaux ? Bien sûr, chaque cultivateur en avait un pour le labour, pour tirer l'antique moissonneuse-lieuse ou le lourd chariot de bois chargé de foin. Quand nous sommes arrivés en 1956, seul le Joseph avait un tracteur. Un engin Massey Ferguson gris qui faisait envie aux autres. Puis chaque ferme s'équipa l'une après l'autre, très rapidement. Et les chevaux ont quitté le paysage. Le Camille conserva sa jument, la Louise, pour qui il avait une réelle amitié. Elle finit sa vie paisiblement, l'été dans une verte prairie derrière la ferme, l'hiver, dans son boxe à l'entrée de l'écurie.
J'ignorais en arrivant que l'animal puisse être dangereux et je n'oublierai jamais ce jour où je courrais inconsciente à côté de la Louise qui galopait dans le pré derrière "le Château". Je ne compris pas de suite pourquoi le Camille m'avait attrapée au vol et éloignée de l'animal en me saisissant dans ses bras tout en me gondant... j'ai retenu la leçon et je garde une certaine crainte des chevaux. Mais quand, lors d'une nuit de Noël, la Louise a mis au monde son petit poulain, la joie et l'émotion furent grandes et la veillée inoubliable. Nous avons peu dormi, ébahis par le spectacle de ce petit, debout, maladroit sur ses pattes mal coordonnées, qui tétait déjà tandis que sa mère léchait son poil encore humide. C'est nous, les enfants, qui ont eu l'honneur de lui donner le nom peu original de "Louison".
Etonnamment naïve, du haut de mes six ou sept ans, je ne fis pas le lien entre cette naissance et celle des bébés ! Pas plus que quand les vaches se grimpaient l'une sur l'autre, je ne comprenais pas ce que cela voulait dire quand on disait qu'elles "allaient au taureau", et ne posais pas de question. Certains sujets étaient tabous malgré l'exemple que nous fournissait quotidiennement la nature !
Et puis, un jour, nous avons dû quitter Buzy. La promotion de Papa impliquait qu'il prenne en charge un bureau des PTT plus important. Nous avons ainsi migré pour trois interminables années dans la Thiérache aux vertes prairies et riches "vachers". Je n'y avais pas d'amies de famille d'éleveurs et j'ai pris mes distances avec les vaches qui ne redevinrent pas particulièrement nos voisines quand nous avons réintégré la Lorraine Mosellane. Mais je garde pour ces grosses bêtes bien sympathiques une grande tendresse et je leur rends souvent hommage avec mon appareil photo en leur tirant le portrait... parce qu'elles le valent bien.
Mais aussi les chevaux...
Et les chevaux ? Bien sûr, chaque cultivateur en avait un pour le labour, pour tirer l'antique moissonneuse-lieuse ou le lourd chariot de bois chargé de foin. Quand nous sommes arrivés en 1956, seul le Joseph avait un tracteur. Un engin Massey Ferguson gris qui faisait envie aux autres. Puis chaque ferme s'équipa l'une après l'autre, très rapidement. Et les chevaux ont quitté le paysage. Le Camille conserva sa jument, la Louise, pour qui il avait une réelle amitié. Elle finit sa vie paisiblement, l'été dans une verte prairie derrière la ferme, l'hiver, dans son boxe à l'entrée de l'écurie.
J'ignorais en arrivant que l'animal puisse être dangereux et je n'oublierai jamais ce jour où je courrais inconsciente à côté de la Louise qui galopait dans le pré derrière "le Château". Je ne compris pas de suite pourquoi le Camille m'avait attrapée au vol et éloignée de l'animal en me saisissant dans ses bras tout en me gondant... j'ai retenu la leçon et je garde une certaine crainte des chevaux. Mais quand, lors d'une nuit de Noël, la Louise a mis au monde son petit poulain, la joie et l'émotion furent grandes et la veillée inoubliable. Nous avons peu dormi, ébahis par le spectacle de ce petit, debout, maladroit sur ses pattes mal coordonnées, qui tétait déjà tandis que sa mère léchait son poil encore humide. C'est nous, les enfants, qui ont eu l'honneur de lui donner le nom peu original de "Louison".
Etonnamment naïve, du haut de mes six ou sept ans, je ne fis pas le lien entre cette naissance et celle des bébés ! Pas plus que quand les vaches se grimpaient l'une sur l'autre, je ne comprenais pas ce que cela voulait dire quand on disait qu'elles "allaient au taureau", et ne posais pas de question. Certains sujets étaient tabous malgré l'exemple que nous fournissait quotidiennement la nature !
Et puis, un jour, nous avons dû quitter Buzy. La promotion de Papa impliquait qu'il prenne en charge un bureau des PTT plus important. Nous avons ainsi migré pour trois interminables années dans la Thiérache aux vertes prairies et riches "vachers". Je n'y avais pas d'amies de famille d'éleveurs et j'ai pris mes distances avec les vaches qui ne redevinrent pas particulièrement nos voisines quand nous avons réintégré la Lorraine Mosellane. Mais je garde pour ces grosses bêtes bien sympathiques une grande tendresse et je leur rends souvent hommage avec mon appareil photo en leur tirant le portrait... parce qu'elles le valent bien.
J'adore vos récits d'enfance, on s'y croirait ... pour ceux qui ont connu cette époque, c'est tout à fait ça !
RépondreSupprimerMerci...
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