Le 21ème siècle s'achevait dans la morosité. On s'apprêtait à sauter de l'an 2099 à l'an 2100 et sur les réseaux sociaux devenus principale source d'information, on palabrait encore pour savoir si on passait simplement dans une année se terminant par deux zéros ou s'il fallait encore attendre le premier janvier 2101 pour changer de siècle.
Autant par raisons économiques que par souci de laïcité, les fêtes religieuses avaient été abolies depuis un demi-siècle. Les derniers chrétiens ne fréquentant plus les églises, elles furent reconverties en musées ou en salles des fêtes. Beaucoup, en état d'abandon extrême, avaient été rasées dans l'indifférence la plus totale. Les dix nouveaux jours de fêtes répartis dans l'année étaient des fêtes "citoyennes", même en Alsace-Moselle victime consentante de la disparition du Vendredi saint et de la Saint-Étienne. Noël n'était donc plus célébré. C'était d'ailleurs formellement interdit par la loi n° 2049-18 du 1er décembre 2049 et ses nombreux décrets d'applications. Les contrevenants risquaient de lourdes peines. La fin des illuminations dans les rues et la disparition des sapins de Noël, après une gabegie de plusieurs décennies, avaient permis de faire des économies d'énergie substantielles. Quant aux vacances scolaires, elles avaient été adaptées au nouveau calendrier. Ainsi, les vacances d'hiver commençaient le dernier samedi de décembre et duraient dix jours. Le 1er janvier, quant à lui, était toujours fêté avec faste… seul soir où le couvre-feu était levé.
Dans leur pavillon de Fouchy-sous-bois, la famille Tannenbaum, dont les lointains ancêtres avaient quitté l'Alsace en 1870, résistait, à l'image du village d'Astérix dont 100ème album venait juste de paraître. Les parents Tannebaum se faisaient un devoir de raconter à leurs enfants ce que leurs parents leur avaient transmis, le tenant eux-mêmes de leurs propres parents. Ainsi, de père en fils, la tradition des fêtes de Noël alsaciennes avait perduré. Chaque année, un sapin était dressé dans le salon. Vati Tannenbaum alla d'abord au crépuscule couper en cachette un épicéa dans les bois de Fouchy, mais l'installation de caméras de vidéosurveillance devant chaque maison avait rendu l'aventure impossible. Il s'était résigné à dresser en cachette un sapin artificiel trouvé dans une brocante. Cela permettait de fêter la Nativité presque selon la coutume. Mutti cuisinait Bredala, Mannala, langues de pain d'épice et toutes sortes de petits gâteaux qui faisaient le régal des enfants. Au matin du 25 décembre, ils découvraient leurs cadeaux juste avant de partir à l'école.
Ce jeudi 24 décembre 2099, Vati ferma soigneusement les volets avant de grimper au grenier où le sapin était bien rangé dans un carton caché sous de vieilles couvertures poussiéreuses. Il se méfait : les services de police pouvaient le repérer lors de leur ronde !
Mutti avait préparé une petite table pour le présenter. Elle avait aussi sculpté les personnages de la crèche dans du bois tendre et les avait peints avec application. Au repas du soir, on mangerait une dinde aux marrons et une bûche au chocolat.
Quand les enfants rentrèrent de l'école, ils s'exclamèrent devant les guirlandes clignotantes sur le sapin quelque peu défraichi… La famille se mit à entonner "Mon beau sapin…" quand soudain, on frappa violemment à la porte :
- Police, ouvrez !...
Vati, Mutti et leurs enfants furent conduits manu militari au Centre de Détention Familiale. Ils avaient été dénoncés par Clémence et Auguste, les sympathiques voisins avec qui ils organisaient barbecues et méchouis, depuis des années.
Autant par raisons économiques que par souci de laïcité, les fêtes religieuses avaient été abolies depuis un demi-siècle. Les derniers chrétiens ne fréquentant plus les églises, elles furent reconverties en musées ou en salles des fêtes. Beaucoup, en état d'abandon extrême, avaient été rasées dans l'indifférence la plus totale. Les dix nouveaux jours de fêtes répartis dans l'année étaient des fêtes "citoyennes", même en Alsace-Moselle victime consentante de la disparition du Vendredi saint et de la Saint-Étienne. Noël n'était donc plus célébré. C'était d'ailleurs formellement interdit par la loi n° 2049-18 du 1er décembre 2049 et ses nombreux décrets d'applications. Les contrevenants risquaient de lourdes peines. La fin des illuminations dans les rues et la disparition des sapins de Noël, après une gabegie de plusieurs décennies, avaient permis de faire des économies d'énergie substantielles. Quant aux vacances scolaires, elles avaient été adaptées au nouveau calendrier. Ainsi, les vacances d'hiver commençaient le dernier samedi de décembre et duraient dix jours. Le 1er janvier, quant à lui, était toujours fêté avec faste… seul soir où le couvre-feu était levé.
Dans leur pavillon de Fouchy-sous-bois, la famille Tannenbaum, dont les lointains ancêtres avaient quitté l'Alsace en 1870, résistait, à l'image du village d'Astérix dont 100ème album venait juste de paraître. Les parents Tannebaum se faisaient un devoir de raconter à leurs enfants ce que leurs parents leur avaient transmis, le tenant eux-mêmes de leurs propres parents. Ainsi, de père en fils, la tradition des fêtes de Noël alsaciennes avait perduré. Chaque année, un sapin était dressé dans le salon. Vati Tannenbaum alla d'abord au crépuscule couper en cachette un épicéa dans les bois de Fouchy, mais l'installation de caméras de vidéosurveillance devant chaque maison avait rendu l'aventure impossible. Il s'était résigné à dresser en cachette un sapin artificiel trouvé dans une brocante. Cela permettait de fêter la Nativité presque selon la coutume. Mutti cuisinait Bredala, Mannala, langues de pain d'épice et toutes sortes de petits gâteaux qui faisaient le régal des enfants. Au matin du 25 décembre, ils découvraient leurs cadeaux juste avant de partir à l'école.
Ce jeudi 24 décembre 2099, Vati ferma soigneusement les volets avant de grimper au grenier où le sapin était bien rangé dans un carton caché sous de vieilles couvertures poussiéreuses. Il se méfait : les services de police pouvaient le repérer lors de leur ronde !
Mutti avait préparé une petite table pour le présenter. Elle avait aussi sculpté les personnages de la crèche dans du bois tendre et les avait peints avec application. Au repas du soir, on mangerait une dinde aux marrons et une bûche au chocolat.
Quand les enfants rentrèrent de l'école, ils s'exclamèrent devant les guirlandes clignotantes sur le sapin quelque peu défraichi… La famille se mit à entonner "Mon beau sapin…" quand soudain, on frappa violemment à la porte :
- Police, ouvrez !...
Vati, Mutti et leurs enfants furent conduits manu militari au Centre de Détention Familiale. Ils avaient été dénoncés par Clémence et Auguste, les sympathiques voisins avec qui ils organisaient barbecues et méchouis, depuis des années.
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